C’est compliqué de vous écrire allègrement avec tout ce qui passe en ce moment dans le monde.
Mais je vais le faire, car il faut continuer à avancer.
Même dans l’effroi et l’impuissance.
Ce que je fais dans cet espace, c’est décortiquer ce que je ressens, ce qui me traverse.
Et je partage.
Je partage, car je suis persuadée que ce déballage en place publique servira à se faire questionner quelqu’un, quelque part.
Et que cela créera du mouvement.
Une onde vagabonde.
Même la plus infime.
En parlant des petits changements indicibles, j’en discutais cette semaine avec une très bonne amie.
Elle me dit, entre l’entrée et le plat : “J’ai l’impression qu’une chape de plomb s’en est allé. Elle gisait sur mon corps et mes pensées, constamment”.
Elle en a bavé les derniers temps et petit à petit, elle a pris le dessus.
Surtout, elle a fini par accepter qu’elle aimait les femmes. Voilà.
“À ce moment là, ou je me suis sentie pleinement moi, une sorte de culpabilité était partie. Aucune autorisation d’être à demander à personne.”
Ça a fait écho à une pesanteur qu’il n’y a plus sur mon esprit en ce moment.
J’y travaille depuis des années, à vrai dire.
À la place, la douceur s’est installée, ici et là.
Je regarde mon corps qui a fait deux bébés et mes seins tous mous avec tendresse.
Je mords dans cette tartine de pain pleine de beurre en fermant les yeux et en murmurant “mmmmmmmh”.
Je ne vais pas là où je n’ai pas envie d’aller, je ne vois pas les personnes que je n’ai pas envie de voir. Et je n’en suis pas désolée.
Je laisse venir mes angoisses avec empathie pour moi-même. Je prends de la hauteur.
Je prends du temps pour moi au beau milieu de la semaine en pleine journée, sans scrupule.
Et je profite, parce que je mérite.
La douceur est une inclinaison sourde.
À la portée de tous.
Qui soigne.
C’est toute la thèse d’Anne Dufourmantelle dans Puissance de la douceur.
Cette psychanaliste, venue de la philosophie, se questionne sur notre capacité à nous métamorphoser.
Elle garde à l'esprit la question essentielle pour elle du passage de la fatalité vers la liberté, malgré nos conditionnements multiples.
« Il n'y a pas de seuil à la douceur, plutôt une continuelle invitation à être contaminée par elle, qui peut se briser en un instant. »
Une telle disposition d'esprit semble difficile à avoir dans le monde que nous vivons.
La compréhension de la petitesse d'autrui, y compris la sienne propre aide au lâché prise et à l’acceptation.
Nous ne pouvons pas tout changer, mais on peut au moins essayer de préserver son âme de la noirceur.
Et prier qu'un jour nous nous tournions un peu plus vers notre être, sa douceur a tant à nous enseigner.
C’est pas la première fois que je veux te laisser un commentaire, puis je ne le fais pas. Je me suis interrogée sur le pourquoi et crois avoir trouvé la réponse, la réponse serait trop courte pour exprimer ma pensée. Je prendrais le temps dans un retour de mail un jour pour t’accompagner dans ces réflexions. Pour le moment je m’arrête à un simple “je partage, je reconnais beaucoup de choses dans tes textes et j’en suis heureuse”. Heureuse de voir qu’on est pas toutes seules à aller dans ce sens là, celui de la douceur, de la réflexion et de l’acceptation. Que c’est un long chemin, celui d’une vie, qui m’excite énormément. Je te souhaite une douce journée dans ce chaos qui amène sans cesse d’autres milliers de questions.
Ouaouh!!! ma chérie , quelle beauté que ce texte! Je l'ai lu d'une traite comme lorsque l'on boit un délicieux jus d'oranges qui viennent tout juste d'être pressées